En 2009, la visite du président américain Barack Obama a durablement dynamisé la fréquentation du fort de Cape Coast. Cet ancien comptoir commercial ghanéen, où transitaient les esclaves en partance pour l’Amérique, est devenu un lieu incontournable pour les touristes.
Cape Coast, à trois heures de route d’Accra, la capitale du Ghana. Dans cette ville côtière de 82.000 habitants, un monument se démarque. Un fort, dont la façade blanche détonne avec les maisons couleur terre des environs. Dans la grande cour du château, qui offre une vue imprenable sur l’océan Atlantique, de jeunes touristes déambulent. Hugo et ses deux amies sont venus de France. Il était inconcevable pour eux de faire l’impasse sur ce site réputé.
Mais le groupe paraît chamboulé. « Je me suis senti un peu mal, confie Hugo. C’est un sentiment bizarre. Ce type d’attraction touristique change par rapport à ce qu’on voit d’habitude. » Il y a dix ans, les trois Français n’auraient sans doute pas visité le monument. Le fort était alors un site peu connu, en marge des circuits. La venue en 2009 de celui qui était alors président des Etats-Unis, Barack Obama, a changé la donne. A l’entrée du château, une plaque de marbre rappelle fièrement aux visiteurs que l’ancien chef d’Etat est passé par ici.

Le 11 juillet 2009, Barack Obama s’est rendu au fort de Cape Coast – © Maison Blanche (Pete Souza)
Une visite qui a tout changé
« Avant sa venue, les touristes allaient plutôt au fort d’Elmina, à 13 kilomètres d’ici. Mais depuis, le lieu est bien plus connu », explique Anthony Oboadi. Ce Ghanéen de 28 ans fait partie des guides recrutés pour répondre à la demande touristique. Il accompagne les visiteurs dans les différentes salles, des sombres cachots d’esclaves étriqués aux appartements luxueux et aérés du gouverneur. Le jeune homme, lui-même descendant d’esclaves, détaille l’enfer que vivaient les captifs.
Chaque année, 5.000 personnes visitent cet endroit chargé de symboles. Avec des tarifs qui oscillent entre 5 cédis (moins d’un euro) pour les locaux, et 40 cédis (6,50 euros) pour les étrangers, le site génère potentiellement plus de 110.000 cédis (18.500 euros) de recettes annuelles.
Renouer avec ses racines
Si la plupart des touristes sont étrangers, une partie réside au Ghana. Comme Ayuba Seydou, venu de Kumasi, à l’intérieur des terres. C’est la première fois qu’il visite le monument. « Je voulais voir de mes yeux le fort, confie Ayuba. La plupart des Ghanéens ne connaissent Cape Coast que par les cours qu’ils ont reçus, et c’est vraiment dommage. »

Un groupe de visiteurs écoutent un guide dans la cour du fort de Cape Coast © Valentin Chatelier
Cette volonté de retour aux racines se retrouve également chez les membres de la diaspora afro-américaine. Adossé contre un mur, Kwame Asamoah contemple l’horizon, son frère à ses côtés. Cet homme à l’imposante carrure est né au Ghana, puis a passé 34 ans aux Etats-Unis, avant de se réinstaller sur sa terre natale en 2013. Chaque année, il revient à Cape Coast pour visiter le Fort et rendre hommage à ses ancêtres.
« C’est particulièrement important pour les Afro-Américains de revenir ici. Ça nous permet de nous connecter avec ce lieu et de réaliser que nous en sommes tous originaires », note Kwame, qui organise régulièrement des voyages collectifs pour faire connaître le site.
Une attraction qui fait vivre la région
A Cape Coast, l’augmentation de la fréquentation touristique profite à toute la ville. En effet, le monument emploie plusieurs dizaines de personnes. Des guides, principalement, mais aussi des agents chargés du nettoyage et des gardiens. Aux abords du site, les chauffeurs privés ne cessent de patrouiller, à la recherche de touristes.

De nombreux magasins proposent des produits dérivés à l’intérieur du fort. © Valentin Chatelier
Des artistes de rue postés devant l’entrée vendent également leurs peintures. A l’intérieur même du fort, une dizaine de magasins proposent des produits dérivés (tee-shirts, tissus, souvenirs…). « Le château abrite également une librairie très fournie, ouverte à tous les habitants, précise le guide Anthony Oboedi. Les enfants de Cape Coast bénéficient ainsi directement du savoir délivré dans ces livres. »
En 2018, l’Afrique a accueilli 67 millions de touristes, soit 7% de plus qu’en 2017. Et la dynamique devrait se poursuivre, d’après l’Organisation mondiale du tourisme. Avec ses sites mémoriels, le Ghana est bien placé pour profiter de cette manne.
Valentin Deleforterie et Valentin Chatelier
Photo de une : © Valentin Chatelier
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