Au milieu du trafic, paroles de vendeurs de rue

Ils sont des milliers au Ghana à attendre le passage au rouge des feux de signalisation. Marchandises sur la tête ou dans les bras, ils slaloment entre les voitures, attendant d’être hélés. Rencontre avec ces vendeurs ambulants à un carrefour d’une grosse artère d’Accra, le long de la mer.


Tido, 40 ans

« Ici, c’est mon endroit préféré : il y a beaucoup d’embouteillages et donc de clients. En ce moment, je vends des bols à 50 cédis l’unité (8 euros). Ça ne marche pas très bien, surtout avec la saison des pluies. Mais j’ai plusieurs affaires : je propose aussi des casquettes, des sandales, des sacs… Généralement, c’est en me baladant que je repère des produits qui peuvent marcher, je les achète et me fais une marge en les revendant. »

Samira, la quarantaine

« Tous les matins, je me lève à 4 heures, je mixe du maïs, des cacahuètes, du sucre et du gingembre et j’en fais des boules. Puis, à 6 heures, je viens sur la route et je les vends jusqu’à 18 heures. Les petites coutent 2 cédis et les grandes 5. Tout cet argent me revient, je travaille pour moi-même. Mais je ne suis pas riche, je souffre beaucoup, nous sommes huit à la maison. »

Godsway, 29 ans

« J’ai quitté la région de la Volta il y a un an, après avoir perdu ma famille. C’est une entreprise située au marché de Madina, à Accra, qui m’emploie. Je vends des biscuits de 8 heures à 17 heures, sans pause. Chaque semaine, mon patron me paye 150 cédis (25 euros). Ce n’est pas assez pour vivre convenablement… Mais je gagne aussi environ 10 cédis (1,5 euro) de pourboire par jour avec lesquels je peux me nourrir et m’amuser. »

Princess, 25 ans

« Je suis nigériane. J’ai fait des études de pharmacie mais il n’y avait pas de travail dans mon pays. Je suis venue à Accra pour faire de l’argent. Je vends du « bitter-cola », une noix de cola que l’on trouve dans de nombreux médicaments. Elle est bonne pour les yeux, pour le cœur, pour la gorge… Il suffit de l’éplucher et de la mâcher. Beaucoup de gens en consomment et je gagne près de 150 cédis (25 euros) par jour. Avec cet argent, j’espère pouvoir aller au Qatar ou en Arabie Saoudite pour en gagner encore plus. »

Zimbango, 21 ans

« Je suis arrivé seul du Haut-Ghana oriental il y a peu de temps. Je me suis fait embaucher par une entreprise. Je dois vendre 36 bouteilles de lait de soja par jour. C’est très difficile car je viens de commencer, alors je n’ai pas encore eu de salaire. A la fin du mois, je gagnerai 900 cédis (150 euros). Mais pour le moment, je n’ai pas d’argent… »

Evelyn, 45 ans

« L’argent fait tout, alors si tu n’en as pas, tu ne peux rien faire. Je suis arrivée seule de la région de la Volta il y a cinq ans pour gagner de quoi vivre. Mais c’est dur, le coût de la vie est très élevé et les gens n’achètent pas beaucoup. J’habite chez une amie mais j’espère qu’un jour je pourrai me payer ma propre chambre et envoyer de l’argent à ma famille. En attendant, Dieu m’aide à vendre. »

Patrick, 38 ans

« J’adore les chaussures, c’est pour ça que j’en vends. Mais je ne gagne presque pas d’argent. On m’achète deux à trois paires par jour à 35 cédis (6 euros), sur lesquelles je me fais 15 cédis (2,5 euros) de profit. Mais certains jours je n’en écoule aucune. Ce travail, c’est pour me payer mon permis de conduire. Mon rêve : devenir conducteur de taxi. »

Lucie Barbazanges et Marie Desrumaux

Photos : © Marie Desrumaux

Laisser un commentaire